GP du Canada : Récit d’une passion
Par Philippe Laguë
Le Grand Prix et moi… ou les souvenirs (bons et moins bons) de Philippe Laguë
Le Grand Prix du Canada commémore cette année le 40e anniversaire de la victoire de Gilles Villeneuve à Montréal. Le chroniqueur automobile Philippe Laguë a assisté à cet événement historique, véritable pierre d’assise du sport automobile au Canada. En 1978, il avait 14 ans; depuis, il est devenu un habitué du Grand Prix, d’abord comme spectateur, puis comme journaliste. Au cours de ces 40 années, il a entretenu une relation amour-haine avec « notre » Grand Prix. Récit d’une passion en montagnes russes.
Première partie : le coup de foudre
L’amour passionnel commence obligatoirement très fort. Coup de foudre, symbiose, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. J’ai découvert la Formule 1 au cours de la saison 1976, que j’ai suivie, sur une base mensuelle, via le magazine français L’automobile. C’était, ne l’oublions pas, bien avant Internet, avant même que les courses ne soient télédiffusées chez nous. Au Québec, la F1 était quelque chose d’aussi exotique que le polo ou le boulingrin. La bibliothèque du collège que je fréquentais alors recevait chaque mois ledit magazine et le passionné d’auto que j’étais déjà s’est alors converti à la course. Il faut dire que c’était une saison exceptionnelle, celle du duel mythique Lauda-Hunt (celui-là même qui est au centre du film Rush, de Ron Howard).
La saison suivante, coup de théâtre : l’Autrichien Niki Lauda quitte Ferrari avant la conclusion de la saison, avec un deuxième titre de champion en poche. Pour le remplacer, la plus célèbre écurie de course automobile au monde fait appel à un pilote pratiquement inconnu : Gilles Villeneuve, de Berthierville, Québec. Je n’ai pas besoin de vous raconter la suite, vous la connaissez sans doute.
Récapitulons : je découvre la F1 en 1976; à la fin de la saison 1977, un pilote québécois est engagé chez Ferrari; et la saison suivante, en 1978, le Grand Prix du Canada, jusque-là un obscur événement présenté au circuit ontarien de Mosport, déménage ses pénates à Montréal, sur l’île Notre-Dame. Cette fois, c’est le Québec tout entier qui découvre la catégorie-reine du sport automobile. Un des nôtres y est pilote pour l’une des meilleures équipes - championne du monde en 1975 et 1977 - et la plus prestigieuse.
Malgré des résultats scolaires plutôt moyens, j’ai réussi à convaincre mon père de m’acheter deux billets pour le premier Grand Prix disputé à Montréal. Je l’ai sans doute eu à l’usure : je ne parlais que de ça, 24 heures sur 24, 7 jours sur 7. Je vivais par et pour la F1. S’il m’avait empêché d’y aller, j’aurais sans doute fait une grève de la faim, ou une fugue, que sais-je… (Les dénonciations à la DPJ n’étaient pas à la mode dans mon temps)